suite le cousin de Mathilde - partie 5
Sur une hauteur d’un demi-mètre se
déroulent les événements menant à la bataille de Hastings. La matière est
belle, le lin rustique a plutôt bien résisté, les couleurs sont harmonieuses.
L’œuvre pèse plusieurs centaines de kilos,
elle a échappé à de nombreuses tentatives de destruction. Certains n’y voyaient
qu’un vieux tissu, la Révolution française a failli lui être fatale.
C’est émouvant de déchiffrer ce livre
venant du fond lointain de l’époque romane. Pas à pas il y a plus de
soixante-huit mètres d’histoire détaillée à revivre. Le cousin de Mathilde est
très attentif. Il découvre ce qu’il connait uniquement par des reproductions ;
et il commence à lire les écritures qui parsèment les scènes :
— Le sais-tu, je me suis mis au latin
quand je me suis intéressé à cette tapisserie ? Onciales, et caractères romains ;
majuscules. Oui, il y a la traduction disponible, mais c’est un régal de
déchiffrer l’original. La saveur me parait plus forte. La laine n’est pas
noire, non. Les lettres sont brodées en bleu sombre. Les teintes de l’ensemble
sont d’une fraîcheur incroyable. On les croirait juste pressées des plantes.
Il parle à mi-voix devant une solide
monture de l’armée de Guillaume :
— Il est bien vigousse celui-là !
— Eh cousin que dis-tu ?
— Je trouve qu’il ressemble à vos solides
chevaux, il est vigoureux.
Il s’absorbe encore dans le récit de
la fresque.
Le normand regarde avec tendresse une broderie :
Le normand regarde avec tendresse une broderie :
— Regarde ici, la belle ville de Bayeux y
figure, bien sûr.
On en oublierait les origines des
habitants de Normandie, mais les drakkars sont là pour rappeler les navigateurs
hardis des siècles précédents. Comme le reste les têtes de dragon sont bien
stylisées sur les bateaux par les illustrateurs habiles.
—
Mais il fait n’importe quoi, celui- là !
Un visiteur planté juste devant la toile
gêne les cousins, il fait son cinéma et bouscule presque les deux hommes. Enfin
il s’éloigne.
—
Ne t’en
fait pas, il est fada celui-là. Et ce n’est pas le syndrome de Stendhal, c’est
un manque de respect, un jour il y a bien un fou qui a lacéré un tableau de maître…
Allons, il est temps de se replonger dans
la magie de l’instant, respirer l’atmosphère des siècles passés.
Le cousin de Mathilde s’arrête devant une
scène : une étoile filante ? ‘Mirant stella’ ils regardent l’étoile dit le commentaire. Non, il
s’agit d’un phénomène cyclique, visible encore de nos jours. Les artistes ont
représenté avec soin l’apparition de la comète de Halley, selon les calculs de
certains astronomes. C’est un vrai calendrier cette pièce tissée.
— Tu
sais mon cousin, dans le département elle fait encore jaser la comète. L’an
dernier il y avait les deux camps l’un persuadé de la comète, l’autre non ;
j’étais invité chez le président du Conseil Général et ça chauffait…
—
Mais tu as des relations, Le président du
Conseil ! Les congolais m’ont distrait il y a quelques années ; quand on
a ce genre de connaissances ils disent qu’on est un champagné, oui ! Ils
m’ont fait rêver de bulles festives, en pleine Afrique, je ne peux oublier ce
mot si gai. Très imagé.
.....
A la fin de la semaine paraîtra la sixième et dernière partie du voyage du cousin canadien.
Merci de rappeler cette oeuvre émouvante et superbe avec son point lancé ou il me semble le point dit de Bayeux is n'it
RépondreSupprimerTu es plus calé que moi en couture & broderie...
SupprimerJ'aime la rencontre de l'Art et de l'Histoire, et les détails révèlent beaucoup sur le quotidien.